Faut-il une refondation ou une révolution pour l'école française ? Les candidats ont tous des idées sur le sujet mais, curieusement, une vraie vision politique semble absente de leurs préoccupations. On a plus le sentiment qu'ils abordent le sujet pour plaire, ou ne pas déplaire, à un électorat qui, dans un cas, ne leur est pas favorable et qui, dans l'autre, reste fixé sur un passé glorieux sans voir que les temps ont changé. On est loin de la révolution des années 1882 et suivantes et aux antipodes de la refondation de 1959. Tant que le débat restera fixé sur, et sur seulement, les moyens à affecter à l'école, sans autres préoccupations d'efficience du système, les discours actuels resteront clivés et l'école continuera à vivoter jusqu'au jour où les "usagers" (comme on dit aujourd'hui !) décideront d'aller voir ailleurs. Des parents insatisfaits, des élèves qui se demandent pourquoi ils vont à l'école et des enseignants épuisés et démoralisés, des succès mitigés comparés aux standards européens conduisent, me semble-t-il, à l'urgence d'une refondation de notre système éducatif. Et cela doit d'abord passer par la formation des maître dont la mastérisation, maître mot de ces dernières années, a occulté la vraie question : Que faut-il faire pour savoir enseigner ? "On enseigne pas ce que l'on sait, mais on enseigne ce que l'on est", reste d'actualité. L'obtention d'un BAC + 5 comme condition nécessaire et suffisante pour enseigner reste un leurre. Les IUFM étaient loin d'être parfaits mais au moins ils avaient l'avantage de permettre à de jeunes diplômés de "se frotter" à la réalité de la classe sur un temps réduit au tout début de leur carrière ce qui, aujourd'hui, n'est plus possible. S'ajoutent à cela les réformes coup sur coup, "véritables CDD" - à peine l'une est-elle engagée qu'une autre vient s'ajouter - des savoirs à acquérir, l'ignorance volontaire de rapports pertinents et, certes, impertinents, des inspections générales, la lutte fratricide entre les "pédagogistes " et les "antipédagogistes", les demandes pressantes des familles qui ne cessent de critiquer l'école mais, paradoxalement, demandent encore plus d'école. L'école est perdue entre ce qu'elle devrait faire ou ne pas faire, entre répondre aux attentes multiples et souvent incohérentes de la société ou se refermer sur elle-même . La refonder serait avoir le courage de mettre tout à plat, succès comme échecs, et, même si certains egos surdimensionnés doivent en souffrir, oser toucher aux contenus, horaires, statuts, formation etc. Alain SAVARY avait su le faire en 1982 , BERTHOIN en 1959 aussi ; cela est donc possible.